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1 janvier 2007 1 01 /01 /janvier /2007 16:54
Le processus d’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie à l’union européenne arrive comme prévu à son terme au 1er janvier 2007, avec l’entrée effective de ces deux pays au sein de l’espace de libre échange communautaire.
 
Dans le cadre de la logique de guerre économique qui oriente le fonctionnement et les institutions de l’union, les enjeux de l’intégration de ces deux nouveaux pays rappelons le au niveau de vie peu élevé sont nombreux.
 
Parmi ceux-ci, s’il en est un qui  malgré toute son importance n’attire pas l’attention des médias et du public, c’est bien celui de l’agriculture.
 
La Roumanie et la Bulgarie : Deux acteurs agricoles de premier plan
 
Grandes cultures : La Roumanie et la Bulgarie sont des producteurs européens majeurs pour le maïs. Avec un total de 3,327 millions d’ha consacrés à cette culture en 2001 (source Eurostat), ces deux pays représentent à eux seuls 53% des surfaces en maïs de l’Europe des 25 et sont à eux deux largement en position de leader devant la France (1,92 millions d’ha) et l’Italie (1,10 millions d’ha). Mais ils sont également de très importants producteurs de blé (3,9 millions d’ha en 2001, soit 17% des surfaces de la communauté à 25), ce qui les place en seconde position européenne derrière la France (4,76 millions d’ha) et devant l’Allemagne (2,89 millions d’ha). La Roumanie et la Bulgarie sont aussi à eux deux de très grands producteurs d’oléagineux (colza, tournesol,…) (1,35 millions d’ha et 18% des surfaces communautaires), ce qui les positionne sur ce secteur au premier rang devant la France (1,29 millions d’ha) et l’Allemagne (1,19 millions d’ha).
 
Elevage : Les deux nouveaux entrants sont de grands producteurs ovins (9 millions de têtes au total en 2002, soit l’équivalent du cheptel français, 3è pays producteur européen). Ils sont également d'importants producteurs caprins (1,39 millions de têtes, ce qui les place en 3è position européenne derrière la Grèce (5,44 millions de têtes) et l’Espagne (3,04 millions de têtes).
 
Fruits : En 2002, la Bulgarie et la Roumanie sont à eux deux très largement premier producteur européen de prunes (136700 ha), devant l’Espagne (30400 ha) et la Pologne (26900 ha). Mais ils représentent également le deuxième producteur européen de raisin de table (33700 ha) derrière l’Italie (73800 ha) et devant la Hongrie (26200 ha). Avec 13400 ha de pêchers, les deux nouveaux entrants représentent le 4è producteur européen de pêches, derrière l’Espagne (71400 ha), l’Italie (67500 ha) et la Grèce (42500 ha), à égalité avec la France (13600 ha). Ils sont également le 5è producteur de fraises de la communauté (4500 ha) devant la France en 7è position avec 3800 ha.
 
Légumes : La Roumanie et la Bulgarie représentent à eux deux en 2001 le 1er producteur de poivrons de la communauté (30500 ha) devant l’Espagne (23100 ha), le 2è producteur de tomates loin derrière l’Italie (123500 ha), à égalité avec l’Espagne (61500 ha), le 2è producteur de carottes (17100 ha) loin derrière la Pologne (33100 ha) et devant la France (16600 ha), le 2è producteur d’oignons (31300 ha), derrière la Pologne (34000 ha), le 2è producteur de pommes de terre (32500 ha) très loin derrière la Pologne (1,194 millions d’ha). Les deux nouveaux entrants sont également le 5è producteur communautaire de melons derrière l’Espagne, L’Italie, La France et la Grèce.
 
Viticulture : La Roumanie et la Bulgarie représentent à eux deux le 5è producteur viticole de la communauté européenne avec 7,35 millions d’hectolitres produits en 2002.
 
Rappelons que ces éléments doivent être analysés à la lumière des différentiels de coûts de production, estimés pour ces deux pays à seulement environ 30% des coûts de production français, ce qui est largement plus important que les différentiels avec l’Espagne lorsque cette dernière a intégré l’union dans les années 80.  
 
Un enjeu budgétaire
 
Le secteur agricole de la Roumanie et de la Bulgarie éligible aux principales aides communautaires (grandes cultures, élevage) est fortement développé. Il place ces deux pays à quasi égalité en terme d’aides potentielles avec la France, l’Allemagne et l’Espagne, les trois principaux bénéficiaires des aides Pac (aides à la production et aides au développement rural confondues)
 
Après l’intégration en 2005 des 10 autres pays d’Europe centrale sans augmentation du budget européen, le fait que ces deux nouveaux entrants –acteurs agricoles majeurs - intègrent à leur tour la communauté sans moyens supplémentaires ne peut avoir pour conséquence que de très graves tensions sur le budget de l’union, dont rappelons le l’agriculture constitue le principal poste de dépenses.
 
A budget européen constant, il est en effet impossible d’accueillir dans l’union ces deux pays à forte structure agricole sans une diminution drastique des aides agricoles déjà distribuées aux autres pays membres, et cela sans compter les importants besoins spécifiques des nouveaux entrants afin de leur permettre de rattraper leur retard, que ce soit en matière agricole (modernisation, qualité des productions, agri environnement), aussi bien que dans les autres domaines économiques ou encore en matière sociale.
 
Rappelons que lors des 2 dernières vagues d’intégration européenne (Espagne, Portugal, Grèce dans les années 80, pays nordiques dans les années 90), de nouvelles sources de financement communautaires avaient été mises en place afin de pouvoir faire face aux besoins nouveaux et d’intégrer ces pays dans les meilleures conditions et de minimiser les déséquilibres.
 
Sauf à remettre gravement en cause la dimension agricole de la politique européenne, à faire peser lourdement cette intégration sur les exploitations familiales et sur la souveraineté agricole et alimentaire des pays de l’Union, et même s’il est indispensable de réorienter par ailleurs la Pac en faveur d’un autre modèle de développement agricole,  il n’y pas d’autres choix viable pour accueillir les nouveaux entrants que d’augmenter le budget agricole européen et de trouver les nouvelles sources de financement correspondantes. Toute autre option ne peut se traduire que par la remise en question à plus ou moins brève échéance de toute politique agricole commune, y compris en terme de développement rural et d’agri environnement. N’est ce pas ce qui transparaît si on y prête plus d’attention derrière la réforme de la Pac de 2003, et derrière toutes les prises de position - d’où qu’elles viennent - contre les aides européennes agricoles ?
 
Un enjeu économique et territorial
 
La logique économique et budgétaire qui prévaut dans le cadre de l’actuelle intégration ne peut avoir pour conséquence à terme en matière agricole qu’une aggravation des déséquilibres économiques et territoriaux au sein de l’ensemble des pays de l’union, nouveaux entrants compris.
 
La guerre économique qui prévaut ne pourra avoir pour effet qu’une concentration massive des secteurs agricoles des nouveaux entrants, une élimination massive de leurs petites et moyenne exploitations, et lorsque leur agriculture sera restructurée, cela ne pourra se traduire par le jeu du libre marché que par un affaiblissement des autres pays agricoles de l’union. La France, premier producteur agricole de la communauté, qui conserve encore par ailleurs même s’il est malmené un secteur agricole familial de premier plan, est au premier chef concernée par ces enjeux. Elle est ainsi particulièrement fondée à prendre la tête d’une nouvelle ère basée sur des coopérations agricoles mutuellement avantageuses en Europe. Les dirigeants de notre pays comme les prétendants à le diriger ne doivent pas s’évertuer à cacher la vérité sur le budget européen. Ils s’honoreraient à reprendre à leur compte le vote majoritaire des français de 2005 contre la constitution européenne - au premier rang desquels se sont mis en évidence à juste titre l’immense majorité des agriculteurs - pour ouvrir des discussions avec les partenaires communautaires en vue de résoudre par le haut ces questions au bénéfice de tous.
 
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